Simuler pour apprendre à soigner
Intuber, perfuser, ponctionner: pour apprendre à maîtriser ces actes, les futurs professionnels commencent par les pratiquer sans restriction, et surtout sans risque, sur différentes catégories de mannequins ou parties de mannequins. «Les dispositifs les plus simples représentent des bras sur lesquels on peut s’entraîner à faire des injections et des prises de sang, des dispositifs pour apprendre à placer une sonde urinaire ou encore des mannequins pour la réanimation cardio-pulmonaire que l’on peut défibriller», décrit la doctoresse Elisabeth Van Gessel, directrice du Centre interprofessionnel de simulation (CIS) à Genève.
Le nec plus ultra, en matière de mannequins, ce sont les simulateurs dits de haute-fidélité qui représentent un corps entier. Le Centre de simulation dispose d’une vingtaine de mannequins différents dont deux, une femme et un nourrisson, ressemblent en tout point au corps humain. Ils doivent être pilotés par un technicien de simulation en santé qui peut faire varier les constantes vitales, l’état clinique et interagir directement avec les participants: la poitrine des mannequins se soulève au rythme de leur respiration, leur pouls est sensible au cou, au pli du coude et à l’aine. Ils peuvent aussi parler, s’inquiéter, tousser, gémir, faire un arrêt cardiaque. Un mannequin d’obstétrique, une femme enceinte, permet de simuler des accouchements: contractions, expulsion, complications pour la mère avec une hémorragie ou pour l’enfant qui se présente mal.
Tout ou presque peut être simulé. «Les mannequins peuvent être adaptés à toutes les situations en fonction des besoins des étudiants et ils peuvent tous subir des gestes d’urgence tels que la mise en place d’un drain, un massage cardiaque ou encore une trachéotomie», explique la directrice. Les futurs médecins s’entraînent ainsi à pratiquer et peuvent apprendre de leurs erreurs sans risque de faire souffrir ou de tuer leur patient suite à une erreur de manipulation.
Optimiser le travail en équipe
Unique en Suisse, le centre de Genève est aussi l’un des rares centres interprofessionnels de simulation en Europe. En plus de permettre aux étudiants de répéter les protocoles opératoires et de s’entraîner techniquement à certains actes médicaux, c’est surtout l’apprentissage du travail en équipe et son optimisation que le CIS vise. Faire travailler en équipe les personnels médicaux et paramédicaux permet de mieux appréhender la gestion de situations de crise, d’acquérir des connaissances, des compétences et des comportements dans le but final d’améliorer la prise en charge des patients. «La communication entre les professionnels intervenants, et donc entre les métiers qu’ils représentent, est importante, de même que la coordination et la synchronisation entre eux. Il faut savoir en effet que les erreurs médicales lors d’une prise en charge médicale aiguë sont souvent dues à une mauvaise communication entre les professionnels», souligne Elisabeth Van Gessel, directrice du Centre de Genève.
Situations critiques
L’exercice peut sembler ludique mais il n’en est rien. «Travailler sur un mannequin n’a de sens que dans le cadre d’un scénario et d’un objectif à atteindre en matière d’enseignement. Il faut que cela entre dans un contexte de soins, de situations médicales critiques ou rares». Ainsi, les exercices se déroulent dans une salle d’urgence ou de soins et les situations cliniques vécues sont extrêmement proches de la réalité. «Ce qui est important, c’est d’accompagner les étudiants dans l’enchaînement des petits gestes et conduire à une pratique réflexive en leur donnant un feed-back». Dans ce cadre, les interventions sont donc filmées et suivies d’un débriefing.
S’il manque à ces mannequins l’essentiel, à savoir être de vrais patients avec une histoire et des émotions, reste que ces simulateurs sont incontournables dans la formation. «Ils sont là pour que les futurs professionnels se sentent à l’aise dans leur pratique. C’est une manière de mieux les préparer à une première rencontre avec un patient. Avec une meilleure expérience du déroulement de ce type d'actes, les jeunes médecins pourraient notamment éviter une bonne partie du stress qui accompagne les premiers contacts délicats avec des patients», conclut Elisabeth van Gessel.