Les huiles essentielles: mode d’emploi

Dernière mise à jour 31/01/23 | Article
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Ces petits flacons aux milles senteurs séduisent de plus en plus. Les huiles essentielles auraient en effet de multiples vertus. Quels maux peuvent-elles soulager et comment les utiliser en toute sécurité? Deux expertes ont répondu à nos questions.

Et chez l’enfant?

Certains pays – dont la France – déconseillent vivement l’utilisation des huiles essentielles chez l’enfant. En Suisse, on invite à la prudence. Suivant les cantons, les préparations aux huiles essentielles ne sont délivrées que sur ordonnance chez les moins de 30 mois. Pour les plus grands, on recommande des doses extrêmement faibles et adaptées à l’âge. «Les huiles essentielles ont un intérêt pour les infections courantes de l’hiver comme les otites, pour lesquelles on n’a souvent rien d’autre que l’ibuprofène, et permettent parfois d’éviter l’usage d’antibiotiques», déclare Karoline Fotinos-Graf de la SSPM. Par la voie olfactive, elles sont en outre d’un bon secours contre les peurs et maux de ventre psychosomatiques, les difficultés d’endormissement ou les problèmes de peau.

Quelques gouttes sur la peau, un arôme que l’on respire à même le flacon, des effluves diffusées dans l’atmosphère ou un mélange encapsulé que l’on avale ou absorbe… Il y a plusieurs façons de s’emparer des huiles essentielles afin de remédier aux problèmes de santé courants.

Pour obtenir une huile essentielle, on sépare celle-ci de la plante par distillation à la vapeur d’eau, extraction au CO2 ou pressage à froid. Ensuite, tout est histoire de chimie, de mélange, de concentration. Selon les spécialistes interrogées, ces huiles peuvent être utiles dans une foule d’indications, en raison des nombreuses substances qu’elles renferment: «Chacune contient des centaines de molécules ayant une pharmacologie bien précise. On peut les utiliser seules ou en synergie pour obtenir des effets thérapeutiques ou atténuer des effets secondaires», explique Karoline Fotinos-Graf, pharmacienne diplômée en aromathérapie et coordinatrice de la section romande de la Société suisse de phytothérapie médicale (SSPM).

Des doutes et des espoirs

Les plus sceptiques diront qu’à cause de cette complexité chimique, on ne peut pas mener d’études scientifiques de la même manière qu’en médecine scientifique. Difficile en effet d’isoler un principe actif pour l’étudier spécifiquement afin de démontrer son efficacité. Sans compter que la réalisation d’essais en double aveugle (avec placebo) est compromise à cause de leur odeur.

Malgré ces obstacles, des travaux existent: «On observe un nombre toujours plus important de publications», déclare la Dre Michèle Clément-Pralong, médecin spécialiste en anesthésie-réanimation et formatrice à l’École romande d’aromathérapie (ERA). L’aromathérapie séduit de plus en plus, y compris dans le milieu médical. Karoline Fotinos-Graf le confirme: «Il y a beaucoup de recherches universitaires. Une équipe allemande travaille actuellement sur les huiles essentielles et les récepteurs olfactifs. D’autres travaux intéressants portent sur leur pouvoir anti-infectieux et leur capacité à contrer la résistance aux antibiotiques.» Certaines de ces essences sont aujourd’hui bien connues et étudiées. «Il a par exemple été démontré que l’huile essentielle de coriandre est efficace en cas de dermatite atopique», illustre Karoline Fotinos-Graf. Il en va de même pour la lavande contre l’anxiété. Certaines préparations sont d’ailleurs autorisées par Swissmedic, l’organe suisse de surveillance des produits thérapeutiques.

Des propriétés multiples

On prête donc aux huiles essentielles de multiples vertus, une même huile pouvant agir sur différents tableaux. On parle de potentiel anti-infectieux, anti-inflammatoire, mucolytique, cicatrisant et régénérant pour la peau ou antispasmodique. Agissant sur le système nerveux central, elles soulagent les états de stress (insomnie, agitation, tension nerveuse, anxiété, etc.). En quelques secondes, la senteur que l’on respire parvient au système limbique (notre cerveau émotionnel). «La bergamote, appréciée pour ses effets relaxants, agit entre autres sur la sérotonine», illustre la pharmacienne. Les affections ORL (rhume, toux, maux de gorge, sinusite, otite, etc.) répondent bien à ce type de remèdes. De même que les troubles gynécologiques (syndrome prémenstruel, douleurs pendant les règles, mycoses, atrophie des muqueuses utérines, etc.), gastro-intestinaux (digestion, maux de ventre, nausées) ou dermatologiques, notamment. Selon l’affection à soigner, on choisira la voie olfactive (inhalation, spray nasal), orale (capsules à avaler), topique (en crème), des ovules ou suppositoires.

Pas sans risques

Mais l’utilisation des huiles essentielles demande une certaine expertise pour obtenir les effets escomptés et éviter les dangers. «Ce sont des substances actives très puissantes», rappelle Karoline Fotinos-Graf. Selon leur concentration, certaines peuvent être très toxiques pour le foie, les reins, la peau ou le cerveau. Certaines molécules (les cétones, comme dans la sauge officinale, le menthol, le camphre, les phénols, etc.) doivent en effet être manipulées avec précaution. Ce n’est pas tout. Il faut également veiller à recourir au bon chémotype de la plante (sa carte d’identité). Les huiles ont des propriétés médicales très diverses selon leur chémotype. Le thym thymol, qui pousse en bord de mer, est par exemple déconseillé chez l’enfant et la femme enceinte, alors que le thym linalol, qui pousse en altitude, peut être utilisé chez l’enfant.

La plus grande prudence s’impose en effet chez les femmes enceintes ou qui allaitent, les enfants (lire encadré), les personnes âgées, mais aussi en cas d’allergies, d’asthme, d’épilepsie, de polymorbidité ou d’antécédents neurologiques. Il faut également faire preuve de vigilance lorsqu’on a des animaux domestiques (chats, chiens).

Avant de se précipiter sur ces petits flacons, il est donc vivement recommandé de demander conseil à une personne formée en aromathérapie (pharmacien, médecin, etc.). Les huiles essentielles permettent de remédier à de nombreux problèmes de santé courants et sont en ce sens une mesure d’autosoin. Néanmoins, en cas de persistance des symptômes, il faut consulter son médecin. Avoir un diagnostic médical représente une sécurité supplémentaire. «L’aromathérapie n’est pas une médecine douce, mais une médecine complémentaire. Il faut prendre le meilleur de chacune», conclut la Dre Clément-Pralong.

Top 5 des huiles essentielles à avoir chez soi

  • La lavande officinale: pour ses nombreuses propriétés et sa sécurité d’emploi. Sédative et relaxante, elle est bénéfique pour la peau et le système gastro-intestinal.
  • Le ravintsara: un antiviral et anti-infectieuxpour affronter les maux de l’hiver. Il est aussi un allié pour la détente et les douleurs musculaires.
  • Le thym linalol: un stimulant immunitaire, qui agit contre les infections hivernales en plus d’être antibactérien.
  • Le basilic européen: contre les problèmes digestifs, notamment.
  • La camomille bleue: pour son action anti-inflammatoire et anti-allergique. Au même titre que le sapin baumier, elle libère les bronches. Bénéfique pour la peau, elle favorise le sommeil et apaise les symptômes de stress.

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Paru dans Le Matin Dimanche le 29/01/2023

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