L’hypnose, cet outil thérapeutique aux mille facettes
Utilisée à des fins médicales et thérapeutiques, l’hypnose rencontre de plus en plus de succès auprès du public. Dans certains cas de figure, elle peut en effet être un allié précieux. Il existe un vaste panel de pathologies physiques ou psychiques pour lesquelles on peut recourir à l’hypnose.
En milieu hospitalier par exemple, elle est parfois utilisée comme complément à une anesthésie locale lors d’interventions chirurgicales simples, ce qui permet d’éviter une narcose complète. Que ce soit pour changer un pansement, poser une sonde, faire une ponction lombaire ou un geste médical douloureux, le recours à cette technique peut permettre à un patient de mieux vivre des moments délicats. Certaines sages-femmes l’intègrent d’ailleurs dans l’accompagnement des futures mamans lors des accouchements.
En psychothérapie, on peut y avoir recours pour chercher à désamorcer dans l’imaginaire certaines situations problématiques vécues dans le passé ou à vivre dans un avenir proche. Elle peut être utilisée pour traiter des troubles psychologiques comme les addictions, les phobies, les troubles obsessionnels compulsifs, les troubles alimentaires, la démence ou encore la dépression. Enfin, l’autohypnose –une technique accessible à tout un chacun avec un peu de pratique– permet de se détendre, se ressourcer et améliorer son état général sans avoir besoin de faire appel à un thérapeute. Une pratique à mettre en route dès qu’on en ressent le besoin (voir encadré exercices).
L’état de transe
Suis-je hypnotisable?
En principe, tout le monde est hypnotisable. Certaines personnes y arrivent plus facilement que d’autres, mais c’est principalement une question de motivation et de confiance entre hypnotiseur et hypnotisé. Cependant, il faut parfois un peu de temps pour y arriver et il se peut que plusieurs séances soient nécessaires pour parvenir à instaurer le lien de confiance. Quant aux enfants, ils sont généralement d’excellents candidats à l’hypnose car ils font facilement appel à leur créativité et leur imagination. Même les personnes souffrant de schizophrénie, d’autisme ou d’autres maladies mentales peuvent être hypnotisées, mais uniquement par des thérapeutes qui ont l’habitude de travailler avec ce type de patients.
Chaque séance d’hypnose est unique et se déroule selon les besoins du patient, en passant par trois phases distinctes. Tout d’abord, la phase d’induction, qui permet d’entrer doucement en transe. Le thérapeute propose à son patient de se concentrer sur «l’ici et maintenant». Vient ensuite une seconde phase, appelée transe ou phase de travail. C’est à ce moment que se déroule véritablement l’expérience hypnotique. Finalement arrive la phase de sortie, au cours de laquelle le thérapeute demande au patient de revenir à son environnement ordinaire, de redevenir attentif à ce qui l’entoure.
Après la séance, le thérapeute n’a pas besoin de connaître les détails de l’expérience, ni d’obtenir des explications sur ce qui s’est passé pendant la transe. Le but n’étant pas de comprendre l’origine des problèmes mais de parvenir à trouver des solutions pour les surmonter.
Une panoplie d’expériences
Selon le déroulement de la séance, le patient peut être guidé dans différents types d’expériences. On peut par exemple être amené à vivre un événement comme une résurgence du passé, auquel cas on parlera de régression. Le thérapeute accompagne alors le patient dans la modification de cette expérience afin qu’elle s’accorde avec ses attentes de soulagement. La progression, à l’inverse, est un processus qui permet d’accompagner une expérience que l’on projette dans l’avenir. Par exemple, lorsqu’on est angoissé à l’idée de quelque chose qui se produira prochainement, on pourra grâce à cette expérience calmer l’angoisse le jour venu.
L’hypnotiseur peut aussi utiliser la suggestion, qui consiste à transmettre un message avec l’intention d’influencer son récepteur. Dans ce cas, le thérapeute n’impose aucun message au patient, mais lui suggère simplement différentes propositions qui doivent tendre vers le soulagement de la douleur, de l’angoisse, ou des autres problèmes qui ont amené la personne à consulter. Quant à la dissociation, elle vise à intensifier une expérience plutôt qu’une autre. Elle est à la base de la dynamique de l’hypnose et permet de détourner l’attention de l’expérience factuelle actuelle pour la porter davantage sur l’imaginaire. La personne pourra «agir» sur ses pensées, son ressenti, ses peurs.
Enfin, les thérapeutes travaillent également avec la notion d’espace de sécurité (ou safe place). Il s’agit d’un lieu sécurisant, réel ou imaginaire, établi par le patient et dans lequel il va apprendre à se réfugier. Il pourra ensuite l’utiliser dès qu’il en ressentira le besoin, même en dehors des séances.
Exercices d’autohypnose
Devenir l’observateur de ses propres moments de rêverie, parvenir à canaliser ses émotions ou simplement utiliser son rythme respiratoire pour se ressourcer, sont quelques-unes des techniques permettant d’expérimenter la transe sans recourir à un thérapeute. Certains exercices de base ne demandent que quelques minutes et un peu d’entraînement. À vous de jouer.
1. Se recentrer et libérer les tensions
But de l’exercice: Parvenir à sortir ses tensions et à retrouver son assise.
Induction: Asseyez-vous sur une chaise, le dos droit, les mains posées à plat sur les cuisses. Les deux pieds bien à plat sur le sol. Levez les yeux très hauts derrière les paupières fermées. Prenez une grande inspiration qui soulève le thorax et les épaules et bloquez la respiration et le regard en haut. Puis, laissez sortir l’air le plus lentement possible jusqu’à l’abdomen, en même temps que le regard revient en position confortable. Les épaules suivent le mouvement de la respiration et se posent en position habituelle confortable.
Transe: Alors que la respiration se fait naturellement, sans effort particulier, concentrez-vous sur ce double mouvement :
- Utilisez chaque expiration pour souffler dehors une tension. À chaque air soufflé dehors, observez la sensation de soulagement, de légèreté qui l’accompagne.
- Utilisez chaque inspiration pour faire entrer l’énergie de l’oxygène. Mettez cette énergie inspirée dans la colonne vertébrale, observez cette colonne vertébrale qui au fur et à mesure des inspirations se remplit, se regonfle d’énergie.
- Ressentez ce dos qui se fortifie à chaque entrée d’énergie et qui devient alors un axe central qui se pose mieux sur la chaise. Observez alors combien il est confortable de sentir cet axe qui se redresse redevenir le centre de vous-même, fort et plein d’énergie. Quand vous aurez la sensation que la colonne est bien l’axe porteur, que votre tête pose plus légèrement sur cet axe central, alors laissez fleurir, sans rien faire, un sourire intérieur de confiance dans votre savoir-faire.
Sortie: Quand le sourire est là, décidez de sortir. Ouvrez les yeux, revenez naturellement à une attention ordinaire, retrouvez vos sensations habituelles dans chaque partie de votre corps et étirez-vous si vous en avez envie. Reconnectez-vous avec votre environnement et ce qui s’y passe.
Exercice suggéré par la Dre Adriana Wolff.
2. Éliminer la colère et les soucis
But de l’exercice: Mettre vos soucis à distance et trouver une autre façon de les appréhender et de les surmonter.
Induction: Installez-vous confortablement. Serrez très fort votre poing. Mettez dans ce poing tout ce (ou tous ceux) qui vous fâche ou vous met en colère. Yeux ouverts ou fermés, serrez de plus en plus fort votre poing. Au moment où la tension ou la douleur deviennent insupportables, prenez une profonde inspiration et bloquez l’air en vous le plus longtemps possible. Puis laissez tomber le poing contre votre cuisse en relâchant brusquement l’air.
Transe: Observez comment les muscles de votre corps se relaxent à chaque expiration (en devenant plus lourds, plus chauds, en modifiant les sensations d’autocontact et de contact avec l’environnement). Guettez le moment où votre zone de sécurité (safe place) va se manifester à votre conscience (sensation particulièrement plaisante de telle partie du corps, image particulière, souvenir «privé» réconfortant, etc.), sans chercher à la provoquer mais en la laissant venir. Après vous être assuré que cette zone de sécurité est bien là, examinez le problème avec la distance nécessaire, et laissez venir d’autres idées, d’autres images, d’autres suggestions de la partie profonde de vous-même.
Sortie: Revenez naturellement, à votre propre rythme, dans votre environnement et dans le cours ordinaire de la vie.
Tiré de la boîte à outils de l’ouvrage de G. Salem et E. Bonvin, Soigner par l’hypnose, Ed. Elsevier-Masson, 6e édition, 2016
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Références
- Adapté de J’ai envie de comprendre… L’hypnose, de Yseult Théraulaz, avec Eric Bonvin et Adriana Wolf, Ed. Planète Santé, 2016.
- Paru dans Planète Santé magazine N° 26 - Juin 2017
Quand les enfants plongent dans l’hypnose
La médecine intégrative, une alliée en pédiatrie
Hypnose, acupuncture, ostéopathie, méditation de pleine conscience, homéopathie… Les approches de médecine complémentaire sont multiples et suscitent de plus en plus d’intérêt de la part des parents. Selon l’Enquête suisse sur la santé de 2017, 38% de la population des 15 ans et plus en Suisse romande font appel au moins une fois par année à un traitement de médecine complémentaire, un chiffre en constante augmentation depuis 2002.
Ce vif intérêt pour la médecine complémentaire se retrouve également du côté des médecins. On observe en effet une part toujours plus importante de pédiatres et médecins de famille pratiquant une pédiatrie intégrative, ainsi qu’une augmentation des publications scientifiques dans ce domaine. En 2017, un groupe d’intérêt dédié (Swiss Interest Group for Integrative Pediatrics) a été créé, tandis que la pédiatrie intégrative sera le sujet principal du prochain congrès de la Société Suisse de pédiatrie.
Décryptage d’un phénomène en cinq questions-réponses.