Compléments alimentaires: les complications rénales sous-estimées

Environ un quart de la population lausannoise âgée de 35 à 75 ans consomme un type de complément alimentaire, selon une étude parue en 2009. Destinée à compléter un régime, à prévenir ou à traiter une pathologie, la prise de ces compléments alimentaires s’est largement banalisée au fil du temps. Plusieurs éléments expliquent cet attrait: le désir de maîtriser sa santé, le manque de confiance envers les médecins et parfois même la rupture de communication entre un médecin et son patient. Mais au-delà des raisons qui poussent à consommer ces produits, c’est surtout leur accessibilité hors prescription médicale qui pose problème.
Toxicité rénale peu connue
Ces compléments alimentaires échappent au contrôle des autorités de santé, comme la SwissMedic en Suisse ou la Food and Drug Administration (FDA) aux Etats-Unis. Il devient donc plus difficile, en cas de problème de santé, d’identifier une contre-indication ou un effet indésirable dû aux substances consommées. De plus, la toxicité des compléments alimentaires sur les reins est très peu connue et affecte particulièrement les patients atteints d’une maladie rénale chronique.
De la créatine pour modeler la silhouette
Prisée par les sportifs amateurs et professionnels, la créatine est disponible en Suisse en tant que complément alimentaire depuis 1995. Non considérée comme un produit dopant, elle permet de mobiliser une énergie maximale lors d’un effort de courte durée. Plusieurs cas d’effets toxiques de la créatine sur les reins ont été recensés, mais ils restent heureusement peu fréquents. Une étude a même confirmé son absence de toxicité chez des athlètes. En revanche, la toxicité semble avérée dans le cas de maladies rénales chroniques: la créatine est alors vivement déconseillée. Et il en va de même pour les compléments alimentaires hyperprotéinés.
L’acide aristolochique, un puissant néphrotoxique
L’aristoloche, ou Aristolochia fangchi, est une plante capable de provoquer une insuffisance rénale chronique, en raison de la toxicité rénale de l’acide aristolochique qu’elle contient. C’est ainsi que neuf femmes de la région de Bruxelles ont présenté cette pathologie irréversible après avoir consommé des gélules à base d’extraits de racines de plantes chinoises, dans le but de mincir. De l’aristoloche avait été incluse par erreur dans ce complément alimentaire. Une centaine de patients a été touchée, à l’époque, malgré le retrait rapide de cette substance du marché belge. Plus connue, la vitamine C n’est pas dénuée de risques. Prise à haute dose et de façon prolongée, elle doit être considérée comme néphrotoxique.
En conclusion, en cas de maladie rénale aiguë ou chronique d’origine peu claire, le médecin devra rechercher une prise de compléments alimentaires, susceptible d’en être la cause. Il est recommandé aux patients, pour leur part, de se soumettre à un dépistage d’une éventuelle maladie rénale passée inaperçue, avant toute consommation prolongée d’un complément alimentaire.
Référence
Adapté de «Risques rénaux des compléments alimentaires: une cause ignorée», Dr Olympia Dori, Dr Antoine Humbert, Pr Michel Burnier et PD Dr Daniel Teta, Service de néphrologie, Département de médecine, CHUV; Lausanne. In Revue Médicale Suisse 2014: 10: 498-503. En collaboration avec les auteurs.

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