L’automédication, avec précaution
Qui dit médicament en libre-service, ne dit pas «à consommer sans modération»! Le premier risque de l’automédication, c’est le surdosage. En effet, la morphologie, l’âge, le sexe, nécessitent des doses personnalisées. Le métabolisme variant d’un individu à l’autre, l’assimilation d’une substance par l’organisme s’opère plus ou moins rapidement.
Autre danger, l’interaction médicamenteuse, qui peut survenir chez les personnes ayant déjà un ou plusieurs traitements en cours. «Certains principes actifs ne sont pas compatibles, soit parce qu’ils entraînent un risque cumulatif de toxicité, soit parce qu’ils entravent leur élimination ou leur transformation par l’organisme. Attention aussi aux produits contre la grippe par exemple, contenant des molécules multiples, notamment du paracétamol qui devient toxique pour le foie en cas de prise excessive. Il est important de bien regarder leur composition pour éviter un surdosage ou des interactions», détaille la Pre Caroline Samer, médecin-cheffe du Service de pharmacologie et toxicologie cliniques des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG).
Enfin, des effets indésirables peuvent survenir. Les personnes âgées, les enfants et les femmes enceintes ou qui allaitent sont des populations particulièrement vulnérables. Chez elles, la question de l’innocuité des médicaments, y compris ceux à base de plantes, doit se poser avant toute consommation.
Des ordonnances uniques et nominatives
S’automédiquer, c’est aussi parfois remplacer une consultation par un autodiagnostic et une autoprescription. Il est important de le rappeler: toute ordonnance a une durée de vie limitée. «Même s’il reste quelques comprimés d’une précédente prescription dans votre armoire à pharmacie, il est vivement déconseillé de les utiliser sans avis médical. L’efficacité du traitement n’est absolument pas garantie dans ce cas et une telle initiative fait courir le risque de retarder la consultation et donc la mise en place d’un traitement adapté», rappelle Pascal Bonnabry, pharmacien-chef aux HUG. Pour les mêmes raisons, les médicaments d’une ordonnance établie pour une personne de la famille ne peuvent être utilisés par les autres membres du foyer.
Phytothérapie et compléments alimentaires
Sous forme de gélules, gouttes, comprimés ou encore poudre, les compléments alimentaires représentent un marché florissant. Pourtant, l’efficacité de la majorité de ces produits reste à prouver. Ils ne sont par ailleurs pas sans danger. «Une alimentation équilibrée, chez les personnes en bonne santé, apporte tous les nutriments nécessaires au bon fonctionnement de l’organisme. Une supplémentation excessive ou sur le long terme en vitamines, notamment A et D, peut mener à une hypervitaminose et à une toxicité», prévient la Pre Samer.
Quant à la phytothérapie, la prudence est aussi de mise, car certaines plantes peuvent s’avérer toxiques ou modifier l’effet des médicaments. «La vigilance doit en particulier être portée sur les produits vendus sur Internet, qui ne sont souvent pas soumis à la même régulation que les médicaments d’officine», ajoute la spécialiste.
Mollo sur les antidouleurs
Médicaments les plus consommés en Suisse –une personne sur quatre en a utilisé dans les sept derniers jours1–, les antalgiques (paracétamol, anti-inflammatoires non stéroïdiens (ibuprofène), etc.) n’échappent pas à la règle: ils doivent être soumis à la recommandation d’un ou une professionnelle, ne serait-ce que pour en rappeler le bon dosage. Que l’on soit un homme de 70ans avec une maladie chronique, une jeune femme de 20ans en bonne santé ou un enfant en bas âge, les posologies varient. «Il ne faut pas banaliser l’utilisation du paracétamol, dont le surdosage reste la première cause d’hépatite fulminante dans le monde», rappelle la Pre Samer.
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1 Enquête suisse sur la santé 2017, Office fédéral de la statistique.
Article repris du site pulsations.swiss