Le bloc opératoire, entre technologie et savoir-faire
EXPERTS
Un univers unique
On est inconscient quand on y arrive, ou on a la chance de ne jamais y pénétrer. Le bloc opératoire est un endroit que les patients voient rarement, quand bien même ils y sont restés des heures pour une opération. Que trouve-t-on dans cet univers de haute technologie et de haute sécurité? Comment s’agence-t-il? Les réponses de Philippe Bijlenga, neurochirurgien aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG).
En général, les blocs opératoires sont réunis dans la même zone d’un hôpital, relève le médecin. Un sas les sépare de l’extérieur. «Pour y entrer, on se change de pied en cap et l’on enfile des “habits de bloc”».
A l’intérieur, on trouve un environnement stérile. «L’air qui rentre a été filtré et est totalement renouvelé plusieurs fois par heure. La salle est sous pression positive de manière à ce que l’air ne puisse que s’en échapper si l’on ouvre une porte par exemple.» Il y a aussi des normes d’entretien spécifiques : les matériaux utilisés doivent pouvoir être totalement décontaminés et plusieurs nettoyages quotidiens sont réalisés.
Chirurgie et radiologie
Les HUG disposent de plusieurs blocs opératoires. L’un d’eux est bien particulier : c’est la salle hybride, qui réunit une salle d’opération et une salle de radiologie. On y réalise une centaine d’interventions par an, par exemple pour soigner des anévrismes cérébraux (des vaisseaux sanguins dont la paroi se dilate, ce qui perturbe l’approvisionnement du cerveau en oxygène).
Les opérations des vaisseaux sanguins du cerveau sont extrêmement délicates. Et pour cause: «Si le cerveau n’est pas alimenté en oxygène, des dégâts importants peuvent rapidement survenir.» Avant la salle hybride, il arrivait qu’on amène un patient en salle de radiologie au beau milieu d’une opération pour subir un examen d’angiographie et contrôler ses vaisseaux. Dans la salle hybride, l’appareil d’angiographie est à l’intérieur du bloc opératoire.
Et comment le chirurgien se sent-il dans cet environnement particulier? «Même si certaines opérations durent des heures, le temps passe très vite. On est très concentré et l’intervention se compose de toute une série d’événements qu’il faut coordonner avec l’équipe. C’est le même état d’esprit que celui d’un chef d’orchestre.»
La tour d'anesthésie
Elle rassemble le matériel nécessaire au maintien et au contrôle de l’anesthésie : un accès aux gaz, aux ventilateurs, à la pharmacie d’anesthésie, aux produits sanguins et aux moyens de réanimation.
Le chirurgien
Le chirurgien et son assistant opèrent les yeux rivés au microscope pour distinguer les détails du cerveau. Selon le principe de la réalité augmentée, le microscope peut ajouter à cette vue des informations fournies par la radiologie. Pour qu’il puisse les présenter exactement au bon endroit, deux caméras suivent les déplacements de la tête du patient.
Le scialytique
Cette source lumineuse recèle de nombreux miroirs. Ainsi, le chirurgien dispose d’une vue sans ombre du champ opératoire, même s’il se tient devant la lumière.
Le neuroradiologue
Le radiologue et son assistant collaborent avec le chirurgien. Ils manipulent les appareils qui fournissent des images, notamment des vaisseaux sanguins. Mais ils peuvent aussi agir depuis l’intérieur des vaisseaux, par exemple en amenant un dispositif pour «boucher» un anévrisme cérébral, une déformation de la paroi d’une artère qui perturbe le flux du sang.
L'unité d'angiographie
Ce module permet d’avoir une image fidèle des vaisseaux sanguins. Au besoin, il glisse sur un rail jusqu’à la table d’opération pour permettre un examen du patient.
Les tables d'instruments
Des infirmiers instrumentistes sont responsables de fournir aux chirurgiens et aux radiologues le matériel dont ils ont besoin durant l’intervention. Les outils sont nombreux: bistouris, pincettes, aiguilles, fil et bien d’autres. Tous les instruments sont stériles, certains sont à usage unique.
L'électrophysiologiste
Grâce à des électrodes, l’électrophysiologiste peut suivre en direct l’activité électrique du corps du patient ainsi que la réaction du cerveau aux gestes du chirurgien. Il réduit ainsi le risque de léser des structures cérébrales durant l’opération.