Stérilet, implant, diaphragme, patch… les femmes ont le choix
De quoi on parle
En Suisse, les femmes sont de moins en moins nombreuses à prendre des pilules contraceptives, surtout celles de la troisième et de la quatrième génération, qui augmentent le risque de thrombose veineuse pouvant conduire à une embolie pulmonaire. Entre 1990 et 2015, Swissmedic (l’institut suisse des produits thérapeutiques) a reçu seize annonces d’embolies pulmonaires mortelles qui pouvaient être liées à des contraceptifs hormonaux. Depuis, les informations destinées aux médecins et aux femmes ont été «révisées, uniformisées et adaptées aux normes les plus récentes», indique Swissmedic.
La pilule n’a plus la cote en Suisse. Entre 2010 et 2016, le nombre d’emballages vendus, tous types de pilules confondus, a diminué d’environ 20%, selon les chiffres d’Interpharma. La chute a même été de 50% pour les produits dits de troisième génération. Cette réticence s’explique probablement par «l’envie de naturel» qui conduit de nombreuses femmes à refuser un moyen contraceptif à base d’hormones, selon Martine Jacot-Guillarmod, médecin associée au département femme-mère-enfant du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). Mais elle a été largement accentuée par la polémique qui s’est développée fin 2012 à propos des pilules de troisième génération accusées de provoquer des thromboses veineuses pouvant conduire à des embolies pulmonaires. Depuis, «mes patientes sont de plus en plus nombreuses à me dire qu’elles "ont peur" de la pilule car elles ont entendu dire qu’elle est "dangereuse"», constate Michal Yaron, médecin adjointe au service de gynécologie des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Il est vrai, reconnaît-elle, que «ces contraceptifs augmentent légèrement le risque de maladies thromboemboliques, mais celui-ci est beaucoup plus grand au cours de la grossesse».
La pilule peut entraîner des effets secondaires, notamment des maux de tête, des ballonnements, un gonflement des seins ou une prise de poids. Elle a aussi l’inconvénient de devoir être prise tous les jours. En revanche, elle régule le cycle menstruel, diminue les douleurs pendant les règles et les syndromes prémenstruels.
Parler de «la» pilule est d’ailleurs une erreur. «Il existe 45 formulations différentes», précise Michal Yaron, contenant des progestatifs soit seuls, soit combinés avec des œstrogènes, et des dosages en hormones différents. Parmi elles, la plupart des femmes devraient pouvoir trouver celle qui leur convient le mieux.
Quant à celles qui refusent la pilule, elles n’ont que l’embarras du choix. Elles peuvent utiliser un contraceptif contenant une association d’hormones (patch ou anneau) ou ne renfermant que des progestatifs (stérilets aux hormones, implants ou injections), ou encore non hormonal (stérilet au cuivre, préservatif féminin, diaphragme, cape cervicale). Elles peu peuvent aussi suivre la méthode sympto-thermique qui consiste à suivre sa courbe de température et à observer les sécrétions du col de l’utérus et autres manifestations de l’ovulation. Elle est rarement préconisée par les gynécologues, car elle implique «de faire preuve d’une grande rigueur, souligne Martine Jacot-Guillarmod, et d’accepter l’éventualité d’un échec de la contraception», qui survient dans environ 25% des cas.
Les stérilets plébiscités
Actuellement, les femmes ont tendance à préférer les contraceptifs dits LARC (Long-Acting Reversible Contraception, ou méthodes réversibles à longue durée d’action), dont font partie l’implant, les injections et surtout les stérilets.
«Jusqu’à récemment, le stérilet n’était prescrit qu’aux femmes qui avaient déjà accouché, car il était accusé d’augmenter le risque d’infection et d’infertilité, souligne la gynécologue du CHUV. Les études scientifiques ont montré que ce n’est pas le cas et on le propose même en première intention. Beaucoup de jeunes femmes me le demandent, car c’est pratique.»
Certes, certains stérilets sont contestés, comme le Mirena® aux progestatifs, accusé par de nombreuses utilisatrices françaises de provoquer des vertiges, des états dépressifs, une baisse de la libido, etc. «Quel que soit le contraceptif utilisé, il peut en effet avoir des effets indésirables, commente Michal Yaron. Mais chaque femme est unique: certaines les ressentent, d’autres pas.» En guise d’alternative, d’autres modèles de stérilets aux hormones ont été commercialisés au cours des dernières années: Kyleena®, renouvelable tous les cinq ans, et Jaydess®, tous les trois ans. Ils ont l’avantage d’être «plus petits et de renfermer moins d’hormones», explique la gynécologue des HUG.
La mode est toutefois aux modèles en cuivre, et tout particulièrement au Gynial® en forme de boule. Mis sur le marché en février dernier, il est plébiscité par les Suissesses, bien qu’il soit «plus onéreux que les autres stérilets en cuivre», précise Michal Yaron.
Les femmes qui souhaitent éviter une grossesse disposent donc d’une large panoplie de moyens contraceptifs. Il revient à chacune d’elles de trouver chaussure à son pied. En dernier recours, elles peuvent aussi utiliser la pilule du lendemain. Ce n’est évidemment pas la meilleure solution, mais «il ne faut pas culpabiliser pour autant les femmes, surtout les jeunes, qui y ont recours plusieurs fois de suite. Mieux vaut cela qu’une grossesse non désirée», conclut Martine Jacot-Guillarmod.
Et la contraception pour les hommes?
Pour les hommes, la contraception se résume, toujours, aux préservatifs. Cela fait des années qu’est annoncée l’arrivée prochaine de la «pilule pour hommes», mais on ne voit toujours rien venir. Il est vrai qu’il est beaucoup plus difficile de bloquer la spermatogenèse, qui est un processus continu, que l’ovulation.
Pilule jouant sur le taux de testostérone, ultrasons capables de réduire le nombre de spermatozoïdes, gel injectable dans le pénis ou les testicules bloquant le passage du sperme… les scientifiques suivent de nombreuses pistes, jusqu’ici sans grand succès. L’une des plus prometteuses consiste en un gel injectable dans les testicules, mis au point par des chercheurs allemands de l’Université de Munich, avec un financement de l’OMS. Ce produit a été testé sur plus de trois cents hommes et les résultats, publiés en 2016, sont spectaculaires puisque l’efficacité est de 96%. Mais c’est sans tenir compte des effets secondaires –près de 1500 événements indésirables ont été rapportés par les volontaires– qui vont de l’acné aux douleurs au site d’injection, en passant par un intérêt accru pour le sexe, des troubles de l’humeur et bien d’autres. En outre, après l’injection, certains hommes n’avaient pas récupéré une densité normale de spermatozoïdes.
Les recherches se poursuivent, mais elles «avancent très lentement», constate Michal Yaron, médecin adjointe au service de gynécologie des HUG. Des chercheurs britanniques tentent, par exemple, d’élaborer un spray nasal contraceptif qui immobiliserait les spermatozoïdes et les empêcheraient d’atteindre l’ovule. Cette méthode aurait l’avantage «d’être facile à utiliser», constate la gynécologue. Elle serait en tout cas beaucoup moins effrayante pour les hommes qu’une piqûre dans le pénis.
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Paru dans Le Matin Dimanche du 11/06/2017.