Le diabète gestationnel doit être surveillé au-delà de la naissance

Dernière mise à jour 11/09/23 | Article
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Les effets d’un diabète gestationnel sur la santé du bébé et de la mère ne sont pas négligeables. Pour l’un comme pour l’autre, un suivi médical est préconisé pendant plusieurs années après l’accouchement.

La grossesse entraîne d’importants chamboulements. «Elle induit un changement au niveau de l’organisme, qui réagit moins bien à l’insuline. Chez certaines femmes enceintes, sa production diminue également. La combinaison de ces deux facteurs peut provoquer un diabète gestationnel», explique la Pre Jardena Puder, responsable de la Consultation diabète et grossesse au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV)*.

Et après la naissance? 

Pour qu’un bébé dont la mère a été concernée par un diabète gestationnel se développe bien, l’allaitement exclusif prolongé pendant six mois est préconisé. Une diversification alimentaire plus tardive est aussi indiquée. L’enfant a 15 à 20% de risques en plus d’être en surpoids ou obèse. À l’adolescence ou à l’âge adulte, ses chances de souffrir d’un diabète de type 2 sont aussi plus élevées. Du côté de la mère, allaiter lui permet de perdre plus rapidement du poids. «Un an après la naissance, la femme devrait avoir retrouvé son poids d’avant. Pour celles qui sont en surpoids, il serait judicieux de perdre 5% en plus. Les femmes ayant eu un diabète gestationnel ont en effet sept fois plus de risques de développer un diabète de type 2», précise la Dre Marine Claver, gynécologue aux HUG. Et la Pre Jardena Puder, responsable de la Consultation diabète et grossesse au CHUV, de préciser: «Les femmes qui gardent trois kilos ou plus un an après l’accouchement, ont un risque particulièrement élevé de refaire un diabète gestationnel ou de développer un diabète de type 2. D’où l’importance de parvenir à se débarrasser des kilos de la grossesse.» Elles sont également davantage sujettes aux problèmes cardiovasculaires bien des années après la grossesse.

Ce type de diabète se détecte au deuxième trimestre de grossesse par un test de dépistage. Si le résultat est positif, la femme enceinte doit contrôler sa glycémie à jeun et deux heures après chaque repas, modifier son alimentation en conséquence et pratiquer une activité physique adaptée à sa grossesse. «Lorsque cela ne suffit pas, il faut parfois avoir recours à des piqûres d’insuline», explique Olivier Le Dizes, infirmier référent en diabétologie au CHUV. Un suivi pluridisciplinaire est mis en place jusqu’à l’accouchement. Sa collègue Sybille Schenk, diététicienne, précise: «Réduire trop drastiquement les sucres n’est pas nécessaire, car on pourrait avoir tendance à compenser avec des aliments trop gras qui augmentent encore plus la résistance à l’insuline. Le mieux est d’adopter une alimentation équilibrée, d’écouter sa sensation de faim, d’éviter les sodas et boissons sucrées et surtout de ne pas s’imaginer qu’il faut manger pour deux!» 

Facteurs de risques

Les facteurs de risque de cette maladie sont principalement le surpoids, l’âge (plus de 35 ans), la présence dans la famille rapprochée d’un diabète de type 2 (pathologie principalement associée à un surpoids ou à l’obésité, contrairement au diabète de type 1), le stress socio-économique, une mauvaise hygiène de vie et l’ethnicité (les Asiatiques, les Africaines et les Sud-américaines sont plus touchées). 

Prendre trop de kilos en début de grossesse a aussi une incidence sur le développement d’un diabète gestationnel. Les femmes concernées ont un risque supplémentaire de 12% de présenter une hypertension ou une prééclampsie en cours de grossesse. Cette dernière est une maladie grave qui peut nécessiter de provoquer l’accouchement prématurément. 

Des conséquences aussi sur le bébé

«Le diabète gestationnel se manifeste à un moment où les organes du bébé sont déjà formés. Il ne cause donc pas de malformations congénitales, comme cela pourrait être le cas pour un diabète de type 2 préexistant et non traité», explique la Dre Marine Claver, gynécologue au sein du programme Contrepoids Maternité pour femmes enceintes en surpoids aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). 

Malgré cela, l’environnement sucré dans lequel le fœtus évolue a des conséquences sur sa santé. «Le sucre passe la barrière placentaire, ce qui pousse le bébé à produire trop d’insuline. Le foie se met alors à en stocker en grande quantité et à fabriquer de la graisse. C’est pourquoi les femmes souffrant de diabète gestationnel accouchent souvent de nouveau-nés de plus de 4 kg. Dans certains cas cependant, lorsque la mère souffre d’hypertension ou de prééclampsie associées au diabète gestationnel, ils peuvent présenter un retard de croissance», poursuit la Dre Claver. «Il existe un risque accru de naissance par césarienne et prématurée. Il est important de suivre ces grossesses particulières scrupuleusement», insiste la Pre Puder. 

L’accouchement peut aussi être un moment délicat, surtout en cas de diabète gestationnel mal contrôlé. «Pendant toute la grossesse, le fœtus a produit davantage d’insuline pour s’adapter à son environnement plus riche en sucre. Lorsque le cordon ombilical est coupé, il n’est plus dans un environnement aussi riche en glucose. Son corps continue cependant à sécréter cette hormone en grande quantité. Il risque une hypoglycémie, voire même un coma. Le taux de sucre du nouveau-né doit donc être surveillé de près pendant ses 24 premières heures de vie», explique le Dr Karim Gariani, responsable de l’Unité diabétologie des HUG. C’est pourquoi mère et enfant bénéficient d’un suivi post-partum soutenu (lire encadré). 

*https://www.chuv.ch/fr/dfme/dfme-home/femme-mere/grossesse-accouchement/consultations-dobstetrique/diabete-gestationnel

«Je suis très sportive, je ne m’attendais pas à développer un diabète gestationnel»

Claudia Bernasconi, 40 ans, pratique un sport de compétition. De tout temps, elle a fait attention à son alimentation et se définit comme «anti-sucres». Elle a deux filles de 5 et 3 ans. 

Le diagnostic de diabète gestationnel a été posé lors de sa première grossesse, après le test de dépistage habituel. «J’ai été très surprise car je ne fais pas partie des personnes à risque.Je suis très sportive et je mange peu de sucres, je ne m’attendais pas à développer cette maladie», explique-t-elle. Elle est alors suivie par un nutritionniste et une infirmière. «Je devais me piquer pour contrôler ma glycémie. J’envoyais ensuite mes valeurs à l’infirmière afin de garder mon diabète sous contrôle. J’ai drastiquement limité les sucres, bien plus que ce que me conseillait le nutritionniste.» Avec une discipline rigoureuse, la jeune femme parvient à éviter en partie les piqûres d’insuline. «Je n’en faisais qu’une par jour, le soir. Le taux de sucre pendant la journée était contrôlable grâce à mon alimentation, mais pas celui du matin à jeun.» Sa fille naît une semaine avant le terme avec un petit poids de 2,300 kg. «Le taux de sucre sanguin de ma fille a été contrôlé de près pendant ses premières heures de vie et elle n’a pas eu de problèmes de santé.» Aujourd’hui, l’enfant de 5 ans se porte bien. Claudia Bernasconi déjoue les statistiques car elle n’a pas souffert de diabète gestationnel lorsqu’elle attendait sa deuxième fille, alors que la probabilité de récidive lors d’une deuxième grossesse est de plus de 60%.

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Paru dans Le Matin Dimanche le 10/09/2023

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