Contre les douleurs de l’accouchement: rien n’égale la péridurale
Utilisée depuis longtemps généralement avec grand succès, la technique de l’anesthésie par péridurale demeure toujours une technique controversée. Elle est concurrencée par diverses méthodes plus ou moins paramédicales, souvent présentées comme prometteuses mais dont l’efficacité demeure pour une large part à évaluer. Et parce qu’il s’agit de l’accouchement et de la forte charge symbolique associée à cet évènement, les débats sont souvent passionnés. Une importante étude comparative menée sur ce sujet vient d’être publiée. On en trouvera une synthèse ici: Pain management for women in labour: an overview of systematic reviews (Review).
Ce travail a été mené dans le cadre de l’institution Cochrane. Il s’agit là d’une analyse comparative de grande ampleur qui s'est focalisée sur dix-huit recherches systématiques présentant de bonne qualité méthodologique et toutes s’intéressant à la gestion des douleurs pendant le travail. Les auteurs ont tendance à conclure à une efficacité supérieure (ou plus précisément objectivement mieux démontrée) des techniques ayant recours à des antalgiques; et ce de préférence aux techniques de prise en charge dites «alternatives».
Les études qui ont été analysées concernaient les multiples techniques aujourd’hui existantes de prise en charge de la femme au moment de l’accouchement: procédés d’anesthésie péridurales, analgésie par inhalation, utilisation d’opioïdes par voie intramusculaire, analgésiques non opioïdes (paracétamol, ibuprofène..), anesthésie régionale, mais aussi injections d'eau stérile, immersion dans l'eau pendant le travail, méthodes de relaxation comme le yoga, l’acupuncture, les massages, l’hypnose, le biofeedback, l’aromathérapie ou encore la neurostimulation transcutanée.
Trois points généraux sont à retenir, qui ne devraient guère surprendre les professionnel(le)s de l’obstétrique:
- Le type et l'intensité de la douleur ressentie pendant le travail varient considérablement d’une femme à une autre.
- Cette douleur est modulée par de nombreux facteurs physiologiques et psychologiques; parmi eux: la peur et l'anxiété, les éventuels précédents accouchements, le degré de soutien émotionnel lors de l’accouchement.
- La plupart des femmes ont besoin d'une certaine forme de prise en charge de la douleur.
Quelles sont les techniques ayant démontré le plus d’efficacité?
Cette étude comparative établi qu’il existe de solides preuves en faveur des principales formes de péridurale, et tout particulièrement pour l’association «anesthésie rachidienne et péridurale» qui apporte un soulagement plus rapide de la douleur. Les preuves d’efficacité sont moins évidentes pour l’anesthésie par inhalation. Il n’en reste pas moins que ces méthodes ne sont pas toujours sans effets secondaires: l'analgésie par inhalation est associée à des nausées et des vomissements, la péridurale augmente le recours à la ventouse ou aux forceps ainsi que le risque d'hypotension artérielle transitoire pour la femme. On note aussi des difficultés à uriner ou à mobiliser les membres inférieurs.
L’analyse suggère d’autre part que l'immersion dans l'eau, la relaxation, l'acupuncture, l’anesthésie locale, le paracétamol et le recours aux anti-inflammatoires non stéroïdiens peuvent aider à l’équipe à réduire et à «gérer» les douleurs du travail; et ce avec peu d'effets indésirables. Les femmes se déclarent généralement par la suite satisfaites sur l’apport antalgique de ce type d’intervention. La relaxation et l'acupuncture, en particulier, permettent de réduire le recours aux forceps ou par ventouse tandis que l'acupuncture semble pouvoir être de nature à réduire le nombre de césariennes.
Que penser des autres méthodes?
Elle peine à apporter un «niveau de preuves» satisfaisant. Pour autant ceci ne doit pas être entendu comme un équivalent d’inefficacité. L'hypnose, le biofeedback, l’aromathérapie ou l’injection d’opioïdes par voie intramusculaire devront toutefois faire l’objet d’études ultérieures pour emporter la conviction des auteurs. Au total un tel travail comparatif devrait permettre d’élargir la gamme des informations et des réflexions des femmes au cours de leur grossesse. Il devrait de la sorte permettre de nourrir utilement le dialogue avec le gynécologue-obstétricien sur les différentes méthodes disponibles pour soulager les douleurs; et ce tout en en prenant en compte le rapport bénéfice-risque, (du moins lorsqu’il est bien établi) qu’il s’agisse de leur futur enfant ou d’elles-mêmes. De ce point de vue ce travail pourrait être de nature à réduire les controverses infondées que peut encore nourrir un tel sujet.