Attention aux yeux des personnes diabétiques

Dernière mise à jour 19/09/24 | Article
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Pour ne pas risquer de graves problèmes oculaires et une perte de vision, les personnes diabétiques doivent faire régulièrement contrôler leurs yeux.

Peu de gens savent que le diabète met les yeux en péril. «Cette maladie attaque les petits et grands vaisseaux de l’organisme, car une glycémie élevée cause, entre autres, une altération des vaisseaux sanguins», explique le Dr Lazaros Konstantinidis, médecin adjoint à l’unité de chirurgie vitréorétinienne de l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin et responsable de la consultation d’ophtalmodiabétologie. La rétine est très bien vascularisée et est aussi particulièrement sensible aux troubles métaboliques.

35% des diabétiques de type 2 touchés

Reins, cœur, cerveau, nerfs… sous contrôle

Un taux de sucre san­guin trop élevé pendant de nombreuses années a des répercussions sur plusieurs organes. «Une glycémie élevée altère les pe­tits et les gros vaisseaux du corps. Les personnes diabétiques risquent, avec le temps, de développer des problèmes aux reins, aux yeux, mais aussi au cœur ou au cerveau, explique Antoinette Neuenschwander, infirmière clinicienne en diabétologie chez diabètevaud. Sans oublier que les nerfs peuvent aussi être atteints. Ainsi, une blessure au pied, par exemple, peut passer inaperçue et s’infecter.» Qu’il soit de type 1 ou 2, un diabète bien maîtrisé sera moins susceptible de causer des dégâts et des complications. «Un taux de sucre qui monte très haut régulièrement peut entraîner une fatigue intense, un état dépressif, des infections urinaires, des problèmes de cicatrisation. À l’inverse, les hypoglycémies provoquent parfois des malaises avec des risques de chutes et de blessures», conclut Antoinette Neuenschwander.

La maladie oculaire la plus courante chez les personnes atteintes de diabète de type 2 est la rétinopathie diabétique, qui touche environ 35% de celles-ci. On distingue divers stades de la maladie en fonction de sa gravité. La forme précoce, appelée rétinopathie diabétique non proliférante, peut être minime, modérée ou sévère. La paroi des vaisseaux de la rétine se fragilise, ce qui provoque de petits anévrismes et des microhémorragies. Le plus souvent, ces anomalies sont sans répercussion sur la vue.

Lorsque la maladie progresse, les vaisseaux s’obstruent et la rétine ne reçoit plus suffisamment d’oxygène – on parle d’ischémie. Cela engendre souvent la formation de nouveaux vaisseaux normaux. Ils peuvent provoquer des saignements intraoculaires ou un glaucome. Il s’agit alors de la forme proliférante.

Une autre conséquence de ce stade avancé est la formation d’un tissu sur la rétine qui peut engendrer son décollement par traction, ce qui entraîne une perte de vision importante. «Cela nécessite une chirurgie exigeante», explique le Dr Konstantinidis, dont l’une des spécialités est justement ce type d’intervention. Pour rappel, l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin est un centre hautement spécialisé pour la prise en charge des yeux des personnes diabétiques.

Quel que soit le stade de la maladie, les vaisseaux endommagés peuvent causer un œdème maculaire. Il s’agit d’un gonflement du centre de la rétine qui peut faire baisser la vue de façon importante et qui est la cause principale de sa diminution chez les diabétiques. Le Dr Konstantinidis rappelle: «La rétinopathie diabétique est la première cause mondiale de cécité chez les personnes de moins de 50 ans!»

Cette maladie évolue silencieusement, raison pour laquelle le dépistage est indispensable. Le spécialiste précise: «Une personne qui vient d’être diagnostiquée avec un diabète de type 2 doit impérativement prendre rendez-vous chez un ou une ophtalmologue pour faire contrôler l’état de ses yeux. Pour les personnes atteintes de diabète de type 1, le contrôle est recommandé trois à cinq ans après le diagnostic de la maladie, avec un examen avant et durant la puberté.» Dans tous les cas, celles et ceux qui souffrent de diabète doivent, au minimum une fois par an, faire contrôler leurs yeux.

Plusieurs approches sont possibles lorsque le dépistage a été fait à temps. «De nos jours, le traitement le plus efficace consiste en des injections intraoculaires anti-VEGF (le VEGF, facteur de croissance vasculaire endothélial, est une protéine qui joue un rôle dans la création de vaisseaux sanguins, ndlr) ou de corticostéroïdes qui permettent de diminuer la perméabilité altérée des petits vaisseaux de la rétine. Cela réduit l’œdème maculaire et stabilise, voire améliore, l’acuité visuelle», explique le Dr Konstantinidis.

Garder sa glycémie dans des valeurs saines, surveiller son taux de cholestérol et sa pres­sion artérielle sont des facteurs protecteurs.

Situations à risque

Certaines situations demandent une surveil­lance ophtalmique plus étroite. C’est le cas lors d’une correction rapide des valeurs de sucre dans le sang ou quand un nouveau traitement est mis en place, par exemple. La grossesse est aussi un moment délicat (lire témoignage). Ou encore lors de la prise de certains médica­ments contre le diabète, comme le sémaglutide.

Les personnes diabétiques sont aussi deux fois plus à risque de développer un glaucome, une pathologie qui diminue le champ de vision, pouvant aller jusqu’à la cécité si elle n’est pas traitée tôt. La cataracte survient également plus précocement chez les personnes atteintes d’un diabète.

Plusieurs projets de recherche

Rien que dans le canton de Vaud, on estime qu’environ 18’000 personnes souffrent de rétinopathie diabétique. Pas étonnant qu’un grand nombre d’études soient en cours pour trouver de nouvelles pistes thérapeutiques.

L’équipe du Dr Raphaël Roduit, chef du groupe de recherche Dégénérescence maculaire et rétinopathie diabétique à l’Hôpital ophtal­mique Jules-Gonin, en collaboration avec les Dr Konstantinidis et la Prof. Chiara Eandi, a débuté une étude sur les biomarqueurs présents dans l’humeur aqueuse, le liquide se trouvant entre la cornée et le cristallin. Un biomarqueur est une molécule qui témoigne d’un processus spécifique au sein d’une cellule. Sa présence permet de savoir si une inflam­mation ou une maladie est présente là où le biomarqueur a été prélevé. «L’humeur aqueuse est relativement facile à prélever. Nous récoltons également les larmes et le sang des participants et participantes à cette étude», explique le Dr Roduit. Le but de ces prélèvements est de comprendre la corrélation entre la présence élevée de certains biomarqueurs et la survenue d’une rétinopathie proliférante. «Si nous parvenons à faire ce lien, nous aurons une aide au diagnostic précoce», espère le chercheur.

Une autre recherche en cours se penche sur l’angiogenèse, à savoir la création de nouveaux vaisseaux à partir de ceux existants. Ce processus est délétère pour la rétine. «Les bébés nés prématurés et mis sous oxygène à la naissance ont un risque élevé de développer une rétinopathie, induite par une trop grande oxygénation», précise le Dr Roduit. Les chercheurs et chercheuses étudient les cellules de la rétine de souris soumises, pendant leurs cinq premiers jours de vie, à une grande quantité d’oxygène. «On regarde ensuite les cellules qui sont responsables de cette vascula­risation et on tente de trouver un moyen pour les faire diminuer. Cette étude s’avère utile non seulement pour la rétinopathie diabé­tique, mais aussi pour la dégénérescence maculaire liée à l’âge ou pour les cancers oculaires où l’angiogenèse est importante», conclut Raphaël Roduit.

La Dre Jelena Potic et le Dr Alain Jacot-Guillarmod, de l’unité de rétine chirur­gicale de l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin, travaillent quant à eux sur un outil permettant d’observer la rétine avec une grande précision. La Dre Potic explique: «La visualisation de la rétine au niveau cellulaire et la détection des changements induits par les maladies réti­niennes comme la rétinopathie diabétique sont devenues possibles récemment grâce au développement de l’optique adaptative. Il s’agit d’une caméra très précise, utilisée pour le moment uniquement en recherche, qui pourrait permettre de diagnostiquer et évaluer des maladies rétiniennes au niveau d’une seule cellule.» Le projet en cours se fait avec des personnes atteintes de diabète de type 2. Le but est de détecter, par imagerie, les signes précoces du développement de la rétinopathie diabétique. Comme expliqué précédemment, plus vite le diagnostic est posé, meilleures sont les chances de conserver la vue et de limiter la progression de la maladie.

«J’ai eu plusieurs sessions de laser avant mes grossesses»

Les femmes diabétiques enceintes sont plus à risque de développer une réti­nopathie diabétique. Agir en aval est conseillé.

Depuis l’âge de 7 ans, Sabrina Tarchini se sait atteinte de diabète de type 1. Aux alentours de la vingtaine, une rétinopa­thie diabétique a également été diagnos­tiquée. Au fil du temps, la maladie est devenue proliférante (lire article prin­cipal). «Comme je souhaitais avoir des enfants et que je ne voulais pas prendre le risque que ma maladie se péjore, j’ai enchaîné quelques séances de laser pendant les mois qui ont précédé ma première grossesse», explique la trente­naire, désormais mère de deux enfants. Suivie par le Dr Lazaros Konstantinidis, la jeune femme s’est astreinte à des séances qui ont permis d’arrêter la pro­lifération des nouveaux vaisseaux. Une surveillance accrue a été mise en place avant, pendant et après ses grossesses. Aujourd’hui, elle continue à être suivie et sa maladie est stable avec une acuité visuelle de 100%.

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Article repris du site  BienVu!

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