Les bienfaits des graines
Graines de lin, de sésame, de chia, de tournesol et bien d’autres envahissent les rayons des magasins et de multiples publicités vantent leurs vertus. Et en effet, elles sont un véritable concentré d’énergie et renferment des protéines et autres nutriments bénéfiques pour notre santé.
Les protéines
Elles sont «essentielles au fonctionnement de notre organisme», souligne Dominique Durrer, nutritionniste et médecin associée au Service des maladies non transmissibles des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Véritables «briques» à partir desquelles notre corps est construit, les protéines interviennent dans la composition de tous nos tissus. Elles sont aussi à la base de la fabrication des muscles, de la peau, d’enzymes, d’hormones, d’anticorps de notre système immunitaire, etc. Si l’on a un grave déficit en protéines, «on les puise dans les muscles, ce qui nous fait perdre des fibres musculaires, y compris celles du cœur, ce qui peut conduire à l’arrêt cardiaque», précise la nutritionniste.
«Nous avons besoin de 0,8 gramme de protéines par kilo de poids corporel», note Barbara Pfenniger, responsable Alimentation à la Fédération romande des consommateurs (FRC). Ces précieuses molécules biologiques nous sont fournies uniquement par la nourriture. Chez les personnes mangeant de tout, «environ les deux-tiers proviennent des aliments d’origine animale, le reste de produits d’origine végétale». C’est dire que pour celles et ceux qui adoptent un régime végétarien, et a fortiori végan, manger des graines – celles de courge, de tournesol et de sésame étant celles qui en renferment le plus – permet de pallier, du moins en partie, l’absence de viande. Tout en sachant que «les protéines animales sont de meilleure qualité que leurs équivalentes végétales, car ces dernières ne renferment pas l’ensemble des acides aminés essentiels au fonctionnement de notre organisme», remarque la nutritionniste des HUG.
Les Oméga 3 et 6
Le graines de lin, de soja et de chia sont riches en Oméga 3 et celles de tournesol en Oméga 6. Le premier de ces acides gras «protège contre les maladies cardiovasculaires, explique Dominique Durrer. Il est aussi anti-inflammatoire, anti-thrombotique (c’est-à-dire qu’il fluidifie le sang) et il améliore l’humeur». Quant au second, il baisse le taux de cholestérol, mais quand il est en excès, il a «un effet pro-inflammatoire et pro-thrombotique». Or, nous avons tendance à consommer plus d’Oméga 6 que nécessaire. C’est en cela que le régime méditerranéen est bénéfique car il apporte des Oméga 3 et permet de faire pencher la balance du bon côté.
Les vitamines
Les graines renferment diverses vitamines. Notamment de la vitamine B1 «qui participe au métabolisme énergétique et est impliquée dans le fonctionnement du système nerveux, précise Dominique Durrer. Une carence sévère peut induire des pertes de mémoire et de la confusion». On y trouve aussi de la vitamine B6, «essentielle pour la formation des globules rouges et qui influence les systèmes nerveux et immunitaire». Ou encore de la biotine (appartenant à la famille des vitamines B), «importante pour lutter contre la chute des cheveux ou la dépression». Présente dans les oléagineux, la vitamine E a quant à elle un effet antioxydant. Elle doit toutefois être consommée avec modération, précise la spécialiste des HUG, car comme toutes les vitamines anti-oxydantes, «quand elle est ingérée en trop grande quantité, elle a au contraire un effet pro-oxydant».
Les minéraux
Les graines contiennent différents sels minéraux: du calcium (chia, sésame) et du fer (chanvre, sésame, courge), du magnésium (chanvre), etc. Toutefois, ces oligo-éléments sont mal assimilés par l’organisme. Pour tirer parti de leurs bienfaits, la responsable de la FRC conseille de «moudre ou de tremper les graines», tout en précisant qu’elles «ne constituent qu’une partie de l’apport journalier nécessaire». On peut aussi faire pré-germer certaines d’entre elles, «mais encore faut-il savoir le faire et bien observer des règles d’hygiène», car cela peut entraîner des risques d’infection. Pour avoir son content de fer, mieux vaut manger des lentilles, des noisettes ou du boudin.
Les hormones végétales
Sésame et lin sont riches en polyphénols, en particulier en lignanes, qui ont un effet antioxydant, font baisser le «mauvais» cholestérol et sont en outre des phyto-œstrogènes, équivalents végétaux des hormones féminines. Les femmes ayant atteint l’âge de la ménopause auraient donc tout avantage à consommer des graines de sésame, à en croire une étude réalisée par une équipe taïwanaise. Des résultats que Dominique Durrer nuance: «Les chercheurs ont fait ingérer aux femmes 50 grammes de ces graines par jour. C’est énorme.»
Les fibres
Les graines sont également riches en fibres, qui «jouent un rôle extrêmement important dans notre organisme», souligne la nutritionniste des HUG. Il en existe de deux types. Les premières, insolubles, que l’on trouve dans les céréales complètes et les légumineuses, permettent de lutter contre la constipation et «abaissent le taux de glycémie, ce qui est très intéressant pour les personnes diabétiques ou pré-diabétiques». Quant aux secondes, les fibres solubles, surtout présentes dans le lin et le chia, «elles diminuent le taux de cholestérol et ont un effet anti-cancéreux (côlon et sein)».
Qu’elles soient croquées, moulues, intégrées dans des plats sous forme de farines ou utilisées comme épices, les graines sont bénéfiques pour notre santé, «et ce, d’autant plus si elles remplacent les produits ultra-transformés, souligne Barbara Pfenniger. Les recommandations récentes préconisent d’en manger deux à trois portions par jour». Mais il ne faut pas en abuser car, si les graines sont riches en nutriments, elles le sont aussi en calories.
De quoi faut-il se méfier?
Certaines graines peuvent entraîner des effets indésirables. Chez les personnes ayant des diverticules, «elles peuvent s’insérer dans ces petites poches qui se forment sur la muqueuse de l’intestin et provoquer une inflammation (diverticulite)», explique Dominique Durrer, médecin associée au Service des maladies non transmissibles des HUG. Par ailleurs, les fibres ne sont pas recommandées en cas d’intestins irritables, «car elles produisent des gaz et enflamment la paroi du côlon». Le «sésame peut provoquer des allergies», prévient Barbara Pfenniger, responsable Alimentation à la FRC. Et le chia, lui, doit être consommé avec modération car, «pour le moment, il est encore peu étudié».
D’une manière générale, et contrairement à ce que prétendent certaines publicités, les graines «ne sont pas des remèdes miracle». Barbara Pfenniger déconseille d’ailleurs «d’acheter des produits alimentaires spécialement enrichis en graines ou des gélules qui en contiennent». Le mieux est de se procurer des graines – bio de préférence – en vrac et de «les intégrer, entières ou moulues, dans des birchers, des légumes, des quiches, où elles remplacent avantageusement le lard ou autres préparations culinaires». Lors de l’achat, Barbara Pfenniger recommande aussi «de s’enquérir de la provenance des graines, car il y a eu des tromperies à ce sujet». Enfin, conclut-elle, «il faut se méfier des commandes sur Internet, en particulier sur des sites étrangers, car il y a un grand risque de fraude». Une fois ces précautions prises, on pourra bénéficier des bienfaits de ces produits végétaux.
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Paru dans Le Matin Dimanche le 03/01/2021.