Cinq fruits et légumes par jour: oui, mais comment?

Dernière mise à jour 29/09/21 | Article
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Base fondatrice de la pyramide alimentaire, les végétaux doivent avoir une place de choix dans nos habitudes de consommation. Pourtant, la célèbre maxime peine encore à être suivie, voire même comprise. Quelques conseils pour (re)mettre les fruits et légumes au cœur de son assiette.

S’adapter aux petits budgets

Manger des fruits et légumes locaux et bien frais peut représenter un coût important. L’industrie alimentaire a tendance à en profiter, en cassant les prix pour attirer le consommateur vers des produits transformés à l’impact néfaste pour la santé. Afin que l’argent ne soit pas un frein à une alimentation équilibrée, «évitez à tout prix le gaspillage, recommande Muriel Lafaille Paclet, diététicienne cheffe au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). N’achetez pas trop à la fois. Cela évitera que les fruits et légumes pourrissent et qu’il faille les jeter». La spécialiste rappelle également qu’«avec les végétaux, on peut toujours faire quelque chose». Internet regorge de recettes pour utiliser toutes les parties du légume comme les fanes de carotte ou les épluchures. Une purée, une soupe, une compote, et hop, zéro déchet!

Il faut manger cinq fruits et légumes par jour. Pendant des années, cette recommandation quasi universelle a été le cauchemar de Joëlle. Enfant, la jeune femme, née au Tessin, mange à la cantine tous les midis et est forcée de finir son assiette coûte que coûte. S’ensuit un fort rejet des légumes qui durera des années: «Ma maman a tout essayé. Elle a fini par en cacher dans les sauces, les soupes et même dans la pâte à gnocchis pour que j’en mange.» En grandissant, la situation ne s’améliore guère. Adolescente, la tessinoise mange de la salade et des tomates. Un point c’est tout.

Joëlle n’est pas un cas isolé. En 2014, selon une vaste étude1 sur les habitudes alimentaires des helvètes, seul le 13% de la population consommait les cinq portions de fruits et légumes journalières recommandées. Environ 87% des personnes sondées consommaient une ou plusieurs portions de végétaux par jour, mais sans atteindre le fameux chiffre 5.

Cette maxime, difficile à atteindre pour beaucoup, a-t-elle donc vraiment lieu d’être? «Oui, c’est un repère utile pour s’assurer de consommer tous les nutriments dont notre corps a besoin, répond Florence Authier, diététicienne à Neuchâtel. Mais on préfère parler de cinq "portions", qui sont l’équivalent du contenu d’une main. Cela rend mieux compte de la quantité à consommer individuellement, étant donné que chaque végétal a une taille et une densité différentes.»

Mille et une vertus

Si les fruits et légumes ont les faveurs des spécialistes en diététique, ce n’est pas par hasard. En 2017, une étude2 menée par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) estimait que 3,9 millions de décès par année pourraient être imputés à une consommation trop faible de végétaux. Car les micronutriments contenus dans les fruits et légumes ont un réel effet protecteur sur la santé. Les vitamines, minéraux, antioxydants et autres sont indispensables à la croissance de l’organisme et bénéfiques contre de nombreuses pathologies comme certains cancers, les cardiopathies, les accidents vasculaires, etc. «Certaines fibres sont même capables de capter le cholestérol. Leur impact sur le temps de digestion permet aussi d’avoir une influence positive sur le diabète et l’obésité, précise Muriel Lafaille Paclet, diététicienne cheffe au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). Sans oublier qu’elles permettent aux cellules du côlon de se renouveler et qu’elles nourrissent la flore intestinale.»

Plus surprenant encore, une consommation régulière de fruits et légumes montre un impact sur la santé mentale. Lors d’une autre étude3 menée en 2017, des chercheurs de l’Université d’Otago en Nouvelle-Zélande ont établi une corrélation entre la consommation journalière de végétaux et le bien-être psychologique.

Mais attention: il ne suffit pas de se contenter d’une salade à chaque repas pour en tirer des bénéfices. Le maître mot, c’est la variété. Plus on fait des tournus, mieux on couvre nos besoins nutritionnels. «L’astuce, c’est de varier les couleurs et les parfums dans son assiette, ajoute Muriel Lafaille Paclet. Les nutriments ne sont, par exemple, pas les mêmes dans un légume vert que dans un rouge.» Pour varier sans trop de difficultés, les spécialistes recommandent de suivre le rythme des saisons. En achetant si possible local et en respectant les cycles de la nature, on s’assure de répondre aux besoins de son corps et, au passage, de prendre soin de l’environnement.

De petits plats ludiques et colorés

Pour encore plus de diversité, l’étape suivante se passe derrière les fourneaux. Il est recommandé de consommer au moins deux portions de fruits ou légumes crus, car c’est ainsi qu’ils conservent le mieux leurs nutriments, dont la vitamine C. Les autres portions de végétaux peuvent quant à elles être cuites et préparées de diverses manières, en soupe, tarte, gratin, purée, compote… et ainsi mettre l’eau à la bouche. C’est ce qui a provoqué le déclic chez Joëlle. Jeune adulte, elle s’installe en Suisse romande avec son conjoint d’origine mauricienne. Avec lui, elle goûte à des saveurs insoupçonnées. «En famille, les légumes étaient souvent cuits à l’eau. Mais avec mon partenaire, j’ai découvert les currys, les épices, la cuisson au four qui rend croustillant… Aujourd’hui, non seulement je consomme des végétaux avec plaisir, mais je mets un point d’honneur à en manger en quantité suffisante à tous les repas.» Autre repère qui peut être utile: une assiette «idéale» devrait être composée d’un quart de protéines animales ou végétales, un quart de féculents ou légumineuses et d’une moitié de légumes.

De la bienveillance dans son assiette

Induire des changements dans ses habitudes alimentaires est toutefois un processus compliqué qui peut prendre du temps. De l’indulgence envers soi-même est nécessaire. «La recommandation "cinq fruits et légumes par jour" peut parfois mettre une forme de pression et être perçue comme une contrainte, note Florence Authier. Or, l’objectif est simplement d’encourager une consommation quotidienne et régulière.

L’indulgence, Joëlle l’applique aujourd’hui. «Il ne faut pas se mentir: mes légumes préférés restent ceux d’été, comme les tomates, les poivrons ou les courgettes. Alors lorsqu’une grosse semaine m’attend au travail, je vais plutôt privilégier ces légumes-là, pour être certaine d’avoir le courage de les cuisiner en rentrant. Et la semaine suivante, je tenterai de faire un velouté de fenouil pour découvrir autrement ce légume que je n’ai jamais vraiment aimé!»

La controverse du jus de fruit

Pendant longtemps, les programmes nutritionnels recommandaient volontiers un verre de jus de fruits le matin, qui pouvait compter comme l’une des cinq portions journalières recommandée. Mais aujourd’hui, le sujet est controversé. «Les jus de fruits ont tendance à contenir une certaine quantité de sucre, qu’il soit naturel ou ajouté, rappelle Florence Authier, diététicienne à Neuchâtel. De plus, la mastication est une étape importante du processus de digestion qui va manquer si l’on consomme les végétaux uniquement sous forme liquide.» En résumé: privilégiez les fruits frais! Vous pouvez tout de même vous faire plaisir avec un 1,5 dl de jus de fruits de temps à autres, mais évitez ceux qui contiennent des adjonctions.

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Paru dans Le Matin Dimanche le 26/09/2021.

1. Bochud M, Chatelan A, Blanco JM, Beer-Borst S. Anthropometric characteristics and indicators of eating and physical activity behaviors in the Swiss adult population. National nutrition surveys in Switzerland: menuCH 2014-2015.

2. http://www.fao.org/3/cb2395fr/online/src/html/fruits-et-legumes.html

3. Brookie KL, Best GI, Conner TS. Intake of raw fruits and vegetables is associated with better mental health than intake of processed fruits and vegetables. Front Psychol 2018;9:487.

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