Les bactéries influencent-elles le comportement?
Une équipe de chercheurs de l’INRA, l’institut français de recherche agronomique, a démontré que chez les rongeurs la réponse est oui. L’expérience est simple: d’un côté un groupe de rats nés et élevés dans un milieu stérile, donc avec un tube digestif exempt de bactéries. De l’autre des animaux ayant grandit à l’air libre qui ont donc développé un microbiote normal. Placés dans des situations identiques, les deux groupes n’ont pas réagi de la même manière. Les premiers ont adopté un comportement à risque alors que ceux avec un microbiote normal ont été beaucoup plus prudents. Comme si les bactéries les avaient protégés contre une trop grande prise de risque face au danger.
Plus étonnant encore: les chercheurs ont interverti le microbiote de deux groupes de rongeurs. Les rats d’une lignée docile sont devenus plus agressifs quand on leur a transplanté les bactéries de la lignée agressive.
Et l’expérience a fonctionné aussi dans le sens inverse: la lignée agressive s’est adoucie avec les bactéries des rats dociles. Si on ne sait pas encore expliquer par quels mécanismes le microbiote intestinal peut moduler le comportement, ces observations posent la question de l’influence des bactéries sur le caractère.
Une autre équipe de chercheurs, canadienne cette fois, a montré une réduction de l’anxiété chez des souris après un mois d’alimentation avec un seul type de bactérie. Les chercheurs ont montré des effets sur le système nerveux central des souris et une modification des récepteurs GABA. Ces récepteurs sont justement la cible des médicaments anxiolytiques comme les benzodiazépines.
C’est donc un tout nouveau territoire de recherche qui s’ouvre: comprendre comment la micro-flore intestinale agit sur le système nerveux et le cerveau.
Comment les 100 mille milliards de bactéries hébergées dans l’intestin dialoguent avec les cellules de l’organisme. A terme, les scientifiques espèrent trouver dans ces observations chez l’animal de nouvelles approches des maladies mentales chez l’homme.
Stress et flore intestinale
Des études chez les rongeurs ont mis en évidence une réponse différenciée au stress et une prédisposition à l’anxiété liées au microbiote. Dans une étude datant de 2004, les souris stériles se sont montrées plus vulnérables que celles chez qui la colonisation bactérienne était normale. Le niveau d’anxiété et la qualité de réponse au stress ont pu être corrigés grâce à l’introduction de Lactobacilles et de Bifidobacterium. Très récemment, une autre étude a montré que ces mêmes bactéries avaient un impact positif sur l’état dépressif des souris, en agissant sur le niveau de tryptophane, un précurseur de la sérotonine. Des résultats intéressants, mais à prendre avec du recul, prévient le Pr Sansonetti: «D’une part, la souris est menteuse. D’autre part, il nous manque encore beaucoup de connaissances sur le microbiote pour pouvoir extrapoler ces résultats à l’homme.»
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Bactéries et microbiote
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