Arrêter de fumer, les méthodes qui fonctionnent
«Un fumeur sur deux meurt de maladies liées à son tabagisme», estime Mylena Frikart, médecin tabacologue à Lausanne. Cancer, maladies cardio-vasculaires, asthme, bronchite… la liste des méfaits du tabac est longue. Ecraser définitivement sa cigarette n’est pourtant pas facile: en moyenne, sept tentatives sont nécessaires pour y parvenir, car la nicotine figure parmi les substances les plus addictives au monde.
Pourtant, le nombre de fumeurs qui veulent arrêter ne cesse d’augmenter: 50,2% en 2013 contre 41,4% en 2011, selon un rapport du Monitorage suisse des addictions. Les médecins recommandent d’être particulièrement vigilant les trois premiers mois, qui sont, à l’égard du sevrage, les plus déterminants, et d’éviter de boire les trente premiers jours. Comme l’alcool désinhibe, il est dès lors plus facile de céder à la tentation de la cigarette. Surtout, les spécialistes conseillent certaines méthodes spécifiques. En voici les principales, présentées par ordre d’efficacité selon les dernières preuves scientifiques en la matière.
Le Champix®
Aussi appelée varénicline, cette molécule a été créée spécifiquement pour le sevrage tabagique. Utilisée pendant trois mois, elle permet d’«imiter l’effet de la nicotine au niveau du cerveau, ce qui atténue la sensation de manque», selon Mylena Frikart. Selon elle, il s’agit du moyen le plus efficace pour arrêter de fumer, malgré des effets secondaires importants. «Il arrive souvent qu’il provoque des nausées importantes en début de traitement ainsi que des maux de tête et des rêves assez angoissants», explique Carole Clair, médecin cheffe de clinique à la Policlinique médicale universitaire de Lausanne (PMU). Pris en charge par l’assurance-maladie et disponible sur ordonnance, ce médicament est administré avec beaucoup de précautions chez les personnes psychologiquement fragiles. «Des cas de troubles de l’humeur, de dépression, voire des idées suicidaires ont été constatés suite à la prise de ce traitement, même s’il est difficile de déterminer s’ils sont liés au traitement de varenicline ou au sevrage de nicotine», précise Carole Clair. La varénicline est par ailleurs contre-indiquée pour les femmes enceintes ou qui allaitent.
Le bupropion ou Zyban®
Souvent associé à des substituts nicotiniques, le bupropion augmente de manière significative les chances de succès d'abstinence à long terme. Fabriqué à l’origine pour traiter la dépression, «il augmente la concentration de dopamine cérébrale, comme le fait la nicotine», explique Mylena Frikart. Le traitement, uniquement disponible sur ordonnance, dure sept semaines. Il est contre-indiqué «chez les personnes épileptiques ou souffrant de troubles bipolaires», précise la tabacologue.
Les substituts nicotiniques
En vente libre et non remboursés par les assurances, les patchs, inhalateurs et sprays buccaux, gommes à mâcher et autres comprimés, multiplient par deux les chances de succès. Pris sur trois mois en général, les patchs sont souvent combinés à d’autres substituts pour augmenter leur efficacité.
La thérapie cognitivo-comportementale
Associée aux traitements médicamenteux, et pour un suivi d’un an en moyenne, la thérapie cognitivo-comportementale augmenterait les chances de réussite d’environ 50%. «Elle permet d’agir sur le comportement et les réflexes. Il s’agit de trouver des stratégies pour gérer les situations à risque. Cela passe par le découpage du temps en périodes de 24 heures, afin de fixer des objectifs supportables à la personne qui arrête de fumer», explique Mylena Frikart.
La cigarette électronique
«C’est un outil intéressant qui agit comme un substitut nicotinique pour les gens qui n’arrivent pas à cesser de fumer par les méthodes usuelles», selon Jean-Paul Humair, médecin tabacologue et directeur du Centre d’information pour la prévention du tabagisme (CIPRET) à Genève. Ce dernier précise cependant que les études sur les premiers modèles, dont les méthodes n’étaient pas optimales, n’ont pas montré d’effet significatif sur l’arrêt du tabac. Elles ne sont toutefois pas encore assez approfondies pour qu’on puisse le conclure de manière définitive. «La cigarette électronique n’existe en Europe que depuis 2006. Il y a plusieurs fournisseurs sur le marché et la technologie évolue très vite», explique Mylena Frikart. Attention cependant au «risque d’absorption accidentelle de nicotine pure, qui est toxique», précise Jean-Paul Humair.
Homéopathie, hypnose et acupuncture
Même si l’efficacité de ces méthodes alternatives n’a pas été prouvée, «je ne vois aucun problème à ce qu’une personne complète ainsi son traitement. Il n’y a pas d’effets secondaires: si c’est bénéfique, pourquoi ne pas essayer? Tout ce qui peut être utile est bon à prendre!», réagit Mylena Frikart.
Les livres
Les livres comme La méthode simple pour en finir avec la cigarette d’Allen Carr sont aussi un complément intéressant, selon la tabacologue. «Arrêter de fumer, c’est aussi changer de style de vie. Il faut se donner le temps et les moyens de le faire, cela peut donc tout à fait passer par des lectures en plus du traitement principal».
La Suisse frileuse face au paquet neutre
Le paquet de cigarettes sans logo et sans publicité n’a pour l’instant été adopté que par l’Australie, le Royaume Uni, l’Irlande et tout récemment par la France. En Suisse, le Conseil fédéral a estimé en 2014 que cette idée allait «trop loin». «Il faudrait interdire totalement toutes les formes de publicité et introduire les paquets neutres, mais le pouvoir des lobbies rend cet objectif difficilement réalisable en Suisse», commente Jean-Paul Humair. Pourtant, les paquets neutres ont un effet dissuasif, comme le montre une enquête faite en Australie. «La mesure la plus efficace reste la hausse importante et régulière du prix», note Jean-Paul Humair. Une mesure que la Suisse n’applique pas de manière optimale: le coût du paquet de cigarettes n’a augmenté que de 10 centimes en 2013 et de 20 centimes en 2014.
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Cancer du poumon
Chaque année en Suisse, on dénombre environ 4100 nouveaux cas de cancer du poumon (carcinome bronchique), ce qui représente 10 % de toutes les maladies cancéreuses. Le cancer du poumon touche plus souvent les hommes (62 %) que les femmes (38 %). C’est le deuxième cancer le plus fréquent chez l’homme, et le troisième chez la femme. C’est aussi le plus meurtrier, avec 3100 décès par an.