Un test très simple détecte l’apnée du sommeil
Cinq ans d’enregistrements de données ont été nécessaires au Dr Raphaël Heinzer et à son équipe pour élaborer le test NoSAS* (pour No Syndrome d’Apnées du Sommeil). Basé sur cinq critères simples, il permet de détecter en quelques secondes les personnes à risque et, dans un premier temps, d’éviter le recours à des examens diagnostiques plus fastidieux et plus coûteux. Ses résultats ont été validés scientifiquement dans une étude publiée début juin dans la revue The Lancet Respiratory Medicine. Conçu, notamment, pour les médecins généralistes, il est accessible à tous. Une application pour smartphones («NOSAS» sur iPhone et Android) est également disponible.
Un stress majeur
Très fréquent, le syndrome d’apnées du sommeil (SAS) est une maladie due à la fermeture répétée de la gorge pendant le sommeil, ce qui a pour conséquences une perturbation de la qualité du sommeil et des endormissements pendant la journée. «La multiplication des arrêts respiratoires et la baisse du taux d'oxygène dans le sang représentent un stress majeur pour le cœur et le cerveau. Les patients qui souffrent d’apnées du sommeil non traitées ont deux à trois fois plus de risques de développer un accident vasculaire cérébral et trois fois plus de risques de développer une hypertension artérielle, indépendamment des autres facteurs de risque cardio-vasculaire», souligne le Dr Raphaël Heinzer, directeur du Centre du sommeil du CHUV.
Les données épidémiologiques les plus récentes montrent que 49% des hommes et 23% des femmes de plus de 40 ans présentent des apnées du sommeil, mais beaucoup de ces patients ne sont ni diagnostiqués ni traités. Grâce au questionnaire NoSAS, les patients et leurs médecins disposent désormais d’un score clinique fiable pour décider si un enregistrement du sommeil est nécessaire ou non. Cet examen est en effet relativement cher et lourd à organiser, puisqu’il comprend notamment la pose d’électrodes sur la tête et de différents capteurs permettant de mesurer la respiration et les mouvements du corps pendant la nuit.
2000 Lausannois testés
Pour mettre au point le score «NoSAS», le Centre du sommeil du CHUV et de l’Université de Lausanne (UNIL), sous la direction du Dr Raphaël Heinzer, s’est basé sur l’analyse statistique rigoureuse des données de la cohorte lausannoise du sommeil CoLaus/HypnoLaus. Ce groupe témoin est constitué de plus de 2 000 personnes de 40 à 80 ans prises au hasard et ayant accepté d’enregistrer leur sommeil. «C’est la plus grande cohorte non sélectionnée du monde», souligne le médecin. L’échelle pour mesurer le risque d’apnée a pu être testée sur un groupe de personnes d’un autre continent (Sao Paulo, Brésil) avec d’excellents résultats. Cela suggère que le test peut être utilisé dans différentes parties du monde.
Le questionnaire porte sur les cinq facteurs de risque suivants: tour de cou supérieur à 40 centimètres, indice de masse corporelle dépassant 25, sexe masculin, âge de 55 ans et plus, et personne sujette aux ronflements. «Nous avons mis en évidence ces cinq facteurs de risque en comparant les personnes souffrant d’apnées du sommeil ou non. Une statisticienne a ensuite donné un poids à chacun de ces critères en leur attribuant un certain nombre de points. Si le total reste en dessous de 8 points, le risque d’apnées du sommeil peut être exclu avec une certitude allant de 90 à 98%. A partir de 8 points, des enregistrements nocturnes de la respiration et du sommeil sont nécessaires pour confirmer le diagnostic».
Accessible à tous, l’application s’adresse toutefois en premier lieu aux médecins généralistes et à tous les médecins non spécialistes du sommeil. «Il est important pour eux d’avoir un test facile à appliquer pour détecter un SAS chez des personnes dont on ne se doute pas qu’elles pourraient en être atteintes. C’est une aide rapide à la décision qui permet de déterminer en 30 secondes si le patient nécessite des examens plus approfondis. Au CHUV, il est couramment utilisé par les cardiologues et les neurologues. Il est très utile aussi pour les anesthésistes puisque l’on sait que les personnes atteintes de SAS présentent plus de risques de complications après une anesthésie».