Les racines génétiques de la calvitie bientôt décryptées

Dernière mise à jour 18/07/17 | Article
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Les généticiens progressent à grands pas dans la compréhension des facteurs à l’origine de la perte des cheveux. Bientôt, les hommes pourront connaître la vérité sur leur avenir capillaire. Mais le voudront-ils?

En décryptant pas à pas l’ADN du «grand livre du vivant», le généticien se rapproche parfois du cartomancien. Un groupe de chercheurs écossais dirigés par Saskia Hagenaars et David Hill (Université d’Edimbourg) vient ainsi d’annoncer avoir fait un pas important dans la compréhension des causes génétiques de la perte des cheveux, alopécie et calvitie. On sait à quel point cette perte «programmée» peut être douloureusement vécue par ceux qui la subissent, en particulier les hommes qui en sont statistiquement plus exposés. Alors, que peut-on attendre de la génétique?

Une forte composante héréditaire

Le travail de ces chercheurs a été récemment publié sur le site de la revue PLOS Genetics1. Il a consisté, très schématiquement, à démêler l’entrelacs des gènes suspectés d’être directement impliqués dans la perte des cheveux. Les généticiens de l’Université d’Edimbourg ont, patiemment, réussi à identifier plus de 250 régions génétiques en cause dans ce phénomène situé aux frontières du pathologique. Ils estiment aujourd’hui que l’hérédité est directement impliquée dans un peu plus de la moitié des cas. Et sur les 125 gènes identifiés comme liés à la calvitie, 13 sont situés sur le seul chromosome X, hérité de la mère (voir encadré). Les autres sont des gènes déjà connus pour être liés au développement des follicules pileux, à l’épaisseur des sourcils ou encore à la structure des cheveux.

La découverte écossaise marque un progrès notable quand on sait que jusqu’ici seuls quelques gènes suspects avaient été identifiés par les généticiens enquêtant sur les mystères de l’alopécie. Des données inédites qui ont été établies grâce aux prélèvements biologiques effectués sur 52’000 hommes volontaires, âgés de 40 à 69 ans, chauves ou pas, ayant accepté de donner des échantillons sanguins à la «UK Biobank», un remarquable «réservoir biologique» britannique créé en 2007 et qui donne lieu à de multiples recherches génétiques.

L’espoir d’un traitement préventif

Jusqu’ici, on en était longtemps resté aux nombreux travaux recherchant une origine hormonale à la perte des cheveux, mettant le plus souvent en cause un excès d’hormones sexuelles mâles comme la dihydrotestostérone, un dérivé de la testostérone. Puis, en 2008, deux études internationales menées de manière indépendante et publiées dans la revue Nature Genetics avaient établi un lien entre la perte progressive des cheveux après 45 ans et une région du chromosome 20. Cette observation concernait plus précisément l’alopécie la plus répandue, dite «alopécie androgénétique», soit une perte des cheveux commençant sur les tempes, puis progressant sur le sommet du crâne et vers l’arrière.

Une autre étude avait été effectuée par une équipe internationale de l’université McGill de Montréal et du King’s College de Londres, associée à des chercheurs des laboratoires pharmaceutiques GlaxoSmithKline. Elle avait porté sur un petit échantillon de Suisses, de Britanniques, d’Islandais et de Néerlandais. Dans les deux cas, la même région chromosomique avait été tenue pour suspecte. Elle s’ajoutait alors à une autre région située sur le chromosome X laissant supposer que la mère était directement à l’origine de ce phénomène. «Une prédiction précoce de la calvitie, avant le commencement de la chute des cheveux, pourrait conduire à employer des thérapies qui seraient plus efficaces qu’au dernier stade de la perte», estimait alors l’un des auteurs, le Pr Tim Spector (King’s College London).

Aujourd’hui, les auteurs écossais publiés dans PLOS Genetics vont nettement plus loin. Ils expliquent qu’à partir de leurs résultats statistiques, ils ont créé une formule afin de tenter de prédire les risques pour un homme donné de perdre ses cheveux, en fonction de la présence ou de l’absence d’un éventail de marqueurs génétiques impliqués dans la structure des cheveux et leur développement. Cet algorithme prédictif rencontrera-t-il l’écho espéré par ceux qui l’ont mis au point? Les hommes encore jeunes souhaiteront-ils savoir, des années à l’avance, ce qu’il en sera de leur avenir pileux crânien? Après avoir identifié les causes de la perte des cheveux, il reste encore à élaborer un traitement préventif de nature à corriger ce qui demeure, aujourd’hui, une fatalité.

Responsabilités maternelles

«Nous avons identifié des centaines de nouveaux signaux génétiques, dont un grand nombre sont liés à la calvitie masculine, qui proviennent du chromosome X dont les hommes héritent de leurs mères», explique Saskia Hagenaars (Université d’Edimbourg), qui a dirigé le travail des chercheurs écossais.

On sait que tout individu reçoit à parts égales la moitié de son patrimoine génétique de chacun de ses deux parents. Les femmes (XX) reçoivent un chromosome X du côté maternel et un autre du côté paternel. Chez les hommes (XY), le chromosome X ne peut être que d’origine maternelle. Ce sont donc les ascendants du côté maternel qui influencent majoritairement la prédisposition génétique des hommes à perdre leurs cheveux.

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[1]. «Genetic prediction of male pattern baldness» (http://journals.plos.org/plosgenetics/article?id=10.1371/journal.pgen.1006594)

Paru dans Planète Santé magazine N° 26 - Juin 2017

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