Ta tablette t'empêche de dormir
Deux heures d'iPad avant de se coucher ne serait pas bon pour le sommeil. C’est la conclusion à laquelle arrive une équipe de l'Institut polytechnique Rensselaer dans l'Etat de New York. Si l'étude incite à faire attention, elle ne devrait pas non plus alarmer outre mesure. Alors tablet, or not tablet?
Pour arriver à leurs conclusions, les chercheurs ont mesuré chez treize étudiants le taux de mélatonine après deux heures d'utilisation d'une tablette informatique entre 23h et 1h du matin. Cette hormone est «un signal pour le corps qu'il entre dans une phase propice au sommeil», explique Dr Raphael Heinzer du Centre d'investigation et de recherche sur le sommeil du CHUV. La mélatonine est donc ainsi quasi absente de nos organismes durant la journée. En effet, plus nos yeux perçoivent de lumière bleue (contenue dans la lumière blanche du soleil, notamment), moins l’on produit de mélatonine.
Il est cependant connu que l'exposition à certaines lumières fortes et blanches, par exemple les néons d'une salle de bain, peut perturber la production de mélatonine et, de là, le sommeil. L'équipe qui a rédigé l’étude, dirigée par le professeur Mariana Figueiro, a fait l'hypothèse que la luminosité des tablettes informatiques pouvait avoir le même effet.
Changer de tonalité
Le résultat est probant: les étudiants qui ont utilisé l'iPad deux heures sécrètent entre trois et six fois moins de mélatonine que le groupe contrôle (celui-ci a aussi utilisé un iPad deux heures mais avec des lunettes orange qui bloquent la réception par l'œil de la lumière bleue). Après une heure, un résultat positif avait déjà été observé mais il n'est pas statistiquement significatif Il faut cependant préciser que les appareils étaient réglés sur leur luminosité maximum.
L'effet d'un tel écran sur la production de mélatonine est en effet fonction de trois facteurs, détaille le Dr Heinzer: sa proximité de l'œil, sa luminosité et la tonalité de la lumière (la proportion de lumière bleue qu'elle contient). Dans le cas présent, on pourrait donc conseiller aux étudiants de baisser l'intensité de l'écran de leur tablette et de la placer plus loin de leurs yeux. Par contre, pour ce qui est de proposer à l'écran des tonalités plus orangées le soir (et donc moins bleues), la balle est dans le camp des fabricants.
Pédale douce
L'étude souffre néanmoins d'une omission majeure: les cobayes ont pu pratiquer avec leurs tablettes l'activité qu'ils désiraient. On imagine bien que l'excitation suscitée par la lecture de Heidegger n'est peut-être pas celle que provoque un jeu d'arcade haletant. De plus, la production de mélatonine était le seul élément mesuré ici. Certes, elle est diminuée, mais ce n'est pas pour autant que le sommeil en sera perturbé de manière importante. Pour aller plus loin, «il faudrait mesurer la qualité du sommeil des sujets, leur rapidité d'endormissement», détaille le Dr Heinzer.
Et puis, «iPad ou pas, si vous n'avez pas de difficultés à vous endormir, surtout ne changez rien!», s'amuse le Dr Heinzer. Seules les personnes qui présentent des difficultés d’endormissement devraient faire attention à la manière dont elles utilisent ces tablettes. Il rappelle que, pour un bon sommeil, il est recommandé d'arrêter les activités excitantes, stimulantes ou ennuyeuses deux heures avant de se coucher. Pas de déclaration d'impôts ou de partie endiablée de jeu vidéo, donc.
Le sommeil, démodé
«Nous dormons de moins en moins dans nos sociétés, remarque le Dr Raphaël Heinzer. Cela a commencé avec l'éclairage public et s'est poursuivi avec l'arrivée de la télévision dans les foyers. Le travail se fait aussi toujours plus le soir et la nuit. Dernièrement, on a aussi vu la communication, notamment par le biais des ordinateurs et téléphones portables, prendre de plus en plus de place en soirée. Nous conseillons ainsi aux parents de sortir télévision, smartphone et autre tablette de la chambre à coucher de leurs enfants pour garantir à ces derniers un meilleur repos.»
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Insomnies
Les troubles du sommeil constituent un véritable problème de santé publique, tant par leur fréquence que par leurs répercussions humaines, sociales et économiques.